Fractures coronaires : gestion des complications pulpaires
par Stéphane Simon
À l’heure actuelle prime la conservation de la vitalité pulpaire. Nous savons finalement peu de chose sur le type de tissu qui se met en place lorsqu’il y a régénération pulpaire. Un tissu vascularisé s’installe dans la cavité pulpaire et, finalement, peu importe : ce qui compte, c’est d’avoir un tissu vivant avec des capacités de défense.
Lorsque la fracture coronaire n’expose pas la pulpe, l’objectif consistera à protéger cette dernière pour conserver sa vitalité et reconstituer la dent. Si le ou les morceaux de dents fracturées ont été conservés, il s’agira de les recoller, impérativement sous digue, pour s’assurer d’une étanchéité optimale, et dans le laps de temps le plus court possible. Cet acte permet à la fois la protection pulpaire et la restauration de la dent.
Les deux principaux problèmes seront le décollement des fragments et le joint de collage, qui peut devenir apparent. En cas de perte des fragments lors du traumatisme, une restauration composite par stratification va permettre d’atteindre l’objectif de traitement.
Lorsque la fracture coronaire entraîne une exposition pulpaire, il faudra gérer le problème parodontal, puis procéder au coiffage pulpaire et à la restauration de l’organe dentaire.
Lorsque la réparation se fait avec minéralisation pulpaire et perte du trajet canalaire, il convient de s’interroger sur la légitimité physiologique de cette obturation a priori biologique. Empiriquement, il était admis qu’il fallait dépulper la dent si l’exposition pulpaire était de plus de un millimètre.
Les études récentes montrent que trois facteurs doivent être pris en compte :
• l’âge : le taux d’échec sera plus important si le sujet a plus de 40 ans ;
• le type de matériau de coiffage utilisé : le MTA donne de meilleurs résultats que le Dycal®;
• une exposition occlusale aura un meilleur pronostic qu’une exposition proximale.
Les odontoblastes rangés en palissade à la périphérie de la pulpe ont une fonction de protection du tissu pulpaire. Ils vont sécréter de la dentine réactionnelle. Si la plaie expose les cellules pulpaires, ces dernières vont se différencier et sécréter par la suite une dentine réparatrice.
L’inflammation constitue une opportunité de cicatrisation. Elle va permettre la détersion de la plaie, puis sa réparation. Malheureusement, nous ne savons pas maîtriser le potentiel de réparation pulpaire ni quantifier le degré de l’inflammation. La pulpotomie va permettre de conserver la pulpe radiculaire.
Reste la question de l’influence de la quantité de dentine résiduelle sur la réaction pulpaire. Si la cavité est créée de toutes pièces et obturée dans la foulée, la quantité de dentine résiduelle ne va pas influencer la cicatrisation. Les situations de traumatologie se rapprochent de cette situation expérimentale. Mais si la cavité est créée par une carie profonde, l’exposition pulpaire entraînera une moins bonne réaction de la part de la pulpe.
Les cellules souches présentes au sein du parenchyme pulpaire peuvent, sous l’effet des facteurs de croissance libérés lors de la déminéralisation de la dentine (qu’elle soit d’origine carieuse ou liée au mordançage lors d’une procédure de collage), se différencier en cellules pulpaires. C’est la raison pour laquelle les chances de succès sont majorées lorsqu’il est possible de conserver de la dentine.
Les matériaux de coiffage les plus utilisés sont le ProRoot® MTA (Dentsply Maillefer), le Ca (OH)2 et la Biodentine™ (Septodont France). Le MTA, dont les inconvénients sont le coût élevé, la mise en place difficile et une coloration de la dent à terme, permet l’élaboration d’un pont dentinaire jointif au mur dentinaire, ce qui est impossible avec l’hydroxyde de calcium. Le MTA est mis en place après la phase de mordançage (lors de la reconstitution par collage) pour éviter qu’il ne soit éliminé lors du rinçage.
La Biodentine™ (Septodont France) est un matériau synthétique qui va remplacer le MTA dans la mesure où il permet de s’affranchir des problèmes de coloration tout en étant plus facile à manipuler. En conclusion, il est important de ne pas se priver d’un potentiel de réparation en enlevant systématiquement la totalité de la pulpe.
Légende des photographies :
Photo 1 : Cas n° 1 : Fractures coronaires avec effraction pulpaire sur 11 et 12.
Photo 2 : Cas n° 1 : Coiffages pulpaires.
Photo 3 : Cas n° 1 : Résultat à 2 ans après reconstitutions coronaires.
Photo 4 :Cas n° 2 : État initial.
Photo 5 : Cas n° 2 : Coiffage pulpaire.
Photo 6 : Cas n° 2 : Radiographie à 12 mois.
Photo 7 : Cas n° 3 : État initial.
Photo 8 : Cas n° 3. Coiffage pulpaire et résultat à 10 mois.